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Restauration du riad: suite
03.11.2009 Après un mois d'absence, me voilà de retour à Fès. Les travaux ont bien avancé, l'aile du côté de Kasbah Nouar est pratiquement terminée et les ouvriers ont commencé l'aile au dessus du grand salon.
Au rez de chaussée, tous les plafonds en cèdre du grand salon sont aussi terminés. J'avais bien demandé de ne pas placer le bois pendant mon absence mais cela aurait eu pour conséquence de retarder les travaux de l'étage, donc Rachid a pris la décision de passer outre mon instruction. Bon, il est vrai qu'il n'y a rien à dire au niveau de l'aspect des plafonds, les bois choisis sont de premier choix et la finition est de qualité, mais j'espère qu'ils ont bien effectué le traitement. Abdessalam me montre les bidons vides de xylophène pour m'en persuader. J'ose espérer également qu'une attention particulière a été portée au sujet de la présence de vers tant redoutée.
A l'étage, au dessus du grand salon, les murs délimitant les chambres ont été aussi construits, bien posés sur des IPN. Les grandes solives des plafonds de l'étage et qui vont donc supporter la terrasse du riad ont été commandées dans une scierie d'Azrou. Cela n'a pas été facile car, comme je l'ai déjà dit, les lots de bois contiennent peu de grandes pièces de premier choix. Mais finalement Rachid a réussi à rassembler une centaine de ces grandes solives, nous pourrons donc terminer au plus vite le sol de la terrasse sur cette aile car le temps presse à présent, l'hiver arrive.
Alors qu'il faisait à Fès encore 30 degrés il y a une dizaine de jours, derniers soubresauts de l'été, le froid commence à se faire bien sentir à présent. Les journées sont encore agréables mais dès le coucher de soleil et plus tard dans la nuit, la fraicheur est bien là. Bien sûr, j'ai prévu tout ce qu'il faut pour ce séjour et j'ai installé dans ma chambre un duvet bien chaud sur mon lit. Mais la toîlette, le matin, à l'eau froide, n'est pas facile et je ne parle pas des douches...
06.11.2009 Aujourd'hui vendredi et jour férié au Maroc. C'est en effet ce même jour, en 1975, que fut entreprise la marche verte par feu le roi Hassan II à la tête de son peuple, invasion pacifique du Sahara Espagnol qui donna naissance au conflit avec le Polisario, le front de libération de ce territoire, et l'Algèrie, son allié. Depuis, cette région est devenue une partie intégrante du Maroc, le conflit s'est apaisé, du moins sur le plan militaire, mais la question n'est pas vraiment réglée et les frontières avec l'Algérie restent fermées.
J'en profite pour faire le tour du propriétaire dans le riad. Les arbres ont souffert pendant mon absence, des branches ont été coupées sans vergogne malgré mon interdiction, les oranges et les mandarines ont été cueillies et dévorées, seules sont restées les oranges amères...Et personne n'a eu l'idée de les arroser si bien que leur feuillage a beaucoup jauni et même partiellement séché. Je dégage donc la base de leur tronc et leur donne l'eau tant attendue. Dorénavant, je les arroserai régulièrement en espérant qu'ils s'en remettent bien.
07.11.2009 Nous avons décidé avec Rachid et Adil, le menuisier, de nous rendre de nouveau à Azrou pour s'assurer que les grandes solives des chambres sont bien fabriquées et en effet, nous constatons à la scierie que les madriers ont bien été coupés, une trentaine environ. On nous promet une autre trentaine dans quelques jours puis une dernière trentaine plus tard. Pour obtenir ces grosses pièces sans devoir acheter des lots entiers, il a fallu soudoyer le responsable de l'atelier afin que celui ci extraie les poutres voulues d'autres lots et les mette de côté. Nous allons donc nous retrouver avec un ensemble de 90 madriers de 4,40m minimum et de 15x11 cm, ce qui n'est pas une mince affaire parait-il. Bon, en fait ce n'est pas mon problème, Rachid doit fournir le matériel requis et c'est lui qui s'arrange pour l'obtenir.
Par contre sur le chemin de retour, je pense soudain à une chose primordiale. C'est bien beau d'avoir pu obtenir notre bois mais en achetant directement à la scierie, est ce que celui ci est bien sec ? Vraisemblablement non car vu la demande importante, les scieries ne font pas de stocks sur de longues périodes et le bois débité est immédiatement vendu. J'en fais part le soir à Sabah qui contacte l'architecte et celui ci confirme mes doutes et conseille de faire sécher le bois artificiellement dans un grand four. Cette technique de séchage rapide est devenue courante de nos jours car il est rare que l'on laisse les troncs séjourner au moins un an en forêt afin qu'ils sèchent naturellement, rendement oblige.
08.11.2009 Rachid a accueilli la proposition du séchage plutôt fraichement et essaie de louvoyer en proposant des solutions alternatives qui sont autant de compromis peu satisfaisants mais ce serait la seule technique fiable et qui a hélas son côut. Il y aurait aussi une autre méthode tout aussi efficace et qui consiste à introduire à l'intérieur du bois une âme métallique mais cela coûterait encore plus cher et est hors de notre portée. La balle est dans le camp de Rachid, il faudra qu'il propose une solution à ce problême.
10.11.2009 Aujourd'hui les ouvriers ont coulé une dalle au dessus des salles de bain de la future grande suite. Ces deux salles de bain sont l'une à côté de l'autre et auraient eu chacune, selon le plan, une hauteur de plafond de 4,30m, ce qui n'est pas particulièrement esthétique pour une petite pièce. Alors j'ai eu l'idée de les couper en deux dans le sens de la hauteur et de gagner ainsi à l'étage une petite chambre supplémentaire accessible à partir d'une des chambres de la suite par un escalier. Cette chambre qui aura un plafond à 2,10m sera idéale pour des enfants.
13.11.2009 Il fait de nouveau chaud à Fès, 27 degrés en journée alors qu'il fait 8 degrés à Paris.
J'ai aussi changé de café le matin pour mon petit déjeûner, celui où j'allais jusqu'à présent est à l'ombre au moment où je suis là et je trouve justement que c'est un véritable plaisir que de jouir des premiers rayons du soleil. Le premier jour que je suis allé à ce café, il m'ont servi un café au lait qui coûtait 10 dirhams soit le double du prix habituel. Je râle un peu au moment de payer, pensant me faire arnaquer mais le serveur m'affirme que c'est bien le prix. Un client marocain assis à côté de moi m'explique que mon café a été servi dans une tasse alors que le sien l'a été dans un verre et qu'il ne coûte que 5 dirhams. En fait je comprends le stratagème: il y a le café pour les étrangers servi dans une tasse et plutôt moins bon que le second, servi lui dans un verre pour les Marocains et pour les étrangers qui le demandent.
Le lendemain donc, je commande un "qahwa halib fi el kess (café au lait dans un verre)". Le serveur me lance un regard noir...et me sert le café normal, dans un verre, d'ailleurs meilleur que l'autre et presque deux fois plus grand...et à 5 dirhams. Et je souris chaque fois que des touristes commandent un café qui arrive...dans une tasse évidemment. Ici au Maroc, et je trouve particulièrement à Fès, on essaie systématiquement de vendre plus cher aux gaouris, aux étrangers. J'ai acheté il y a quelques jours du tissu pour confectionner un "sac à viande" que l'on met en guise de drap à l'intérieur d'un sac de couchage. La vendeuse dans le magasin m'a demandé 35 dirhams le mètre et quand je suis allé chez le tailleur pour me faire coudre mon drap, celui ci m'a demandé combien j'avais payé le tissu et il m'a dit qu'il valait normalement 20 dirhams le mètre...Lui a exigé seulement 20 dirhams pour le travail de couture, un autre tailleur en voulait 50...Il faut être constamment sur ses gardes et marchander partout. Peu à peu, en baissant chaque jour un peu plus, on arrive à connaitre les véritables prix. Comme au marché par exemple. J'achète presque chaque jour des fruits car ils sont ici succulents et pas chers. Maintenant je connais les tarifs, ceux appliqués aux gens d'ici.
J'ai un petit faible pour les grenades car c'est en ce moment la saison et elles sont magnifiques et parfois énormes, avec de belles couleurs allant du jaune mordoré au rouge vif. Ce fruit est splendide, avec sa forme en boule de Noêl, évoquant immédiatement les jardins des oasis où il était jadis principalement cultivé, à l'ombre des grands palmiers. N'a-t-il pas donné son nom à l'une des plus belles villes d'Andalousie, le paradis perdu des Arabes ? J'adore la grenade et j'en fais en ce moment une véritable cure. Au début, je trouvais sa dégustation un peu laborieuse car je sortais les grains à la main mais quelqu'un m'a appris à la préparer facilement. Il faut couper le fruit en deux mais seulement au niveau de la peau pour ne pas sectionner les grains et perdre du jus. Puis il faut des deux mains forcer le fruit d'un mouvement rotatif qui le fait se scinder en deux moitiés. On prend un bol et on frappe chaque partie au dessus de celui ci avec une cuillère à soupe ou avec le couteau afin de faire tomber les grains. Il faut aussi éliminer les morceaux de peau ou de chair car ceux ci sont très amers. On déguste alors les grains écarlates gorgés de jus et de sucre. Un délice...D'ailleurs les ouvriers me voyant répéter l'opération 2 voire 3 fois par jour m'ont surnommé "bou roumane" (père la grenade) !
14.11.2009 C'est toujours le problème du bois qui me préoccupe. Rachid a cherché partout dans Fès et n'a pas trouvé de four de séchage. Pour prouver sa bonne foi, il déclare que si on lui donne une adresse, il est prêt à y faire traiter le bois sans discuter. Et de plus, il est d'accord d'engager sa responsabilité par écrit sur une période de dix ans. La garantie décennale est automatique chez nous mais exceptionelle ici au Maroc.
Avec le bois, on peut aisément estimer la qualité mais pour son degré d'humidité, il n'y a guère que le pesage qui puisse nous renseigner. Nous retournons chez le fournisseur à Bab Guissa et je trouve une chûte de cèdre qui au jugé semble bien sèche. Nous la faisons peser et en calculons une masse volumique d'environ 550 kg/m3. En effet, le cèdre n'est pas un bois très lourd. On considère normalement qu'un bois est sec s'il contient moins de 15% d'eau. Il y a toujours de l'eau résiduelle dans le bois, même ancien, environ 5%. Ainsi il suffira de peser chaque solive et de comparer sa masse volumique avec celle de l'échantillon. On pourra même calculer son taux d'humidité exact. Mais Rachid va-t-il se prêter à cette procédure ? Je sens qu'il commence à devenir nerveux car, c'est vrai, cette question du bois lui a coûté beaucoup d'énergie. Et le pesage va bien nous prendre une journée entière.
19.11.2009 Il fallait s'y attendre, Rachid a passé outre le pesage, les poutres arrivent au riad déjà rabotées et prêtes à être placées. J'admets que peser chaque poutre aurait été laborieux et même si on en avait conclu que le bois est encore humide, ce qui est presque sûr, que faire ? Attendre qu'il sèche ou le refuser ? Pas facile d'autant plus que le temps presse à présent avant l'hiver, les plafonds et la terrasse doivent être terminés. En tout cas, ces solives sont belles, bien droites, bien lisses et pratiquement sans noeud.
Avant le montage, je veille particulièrement à ce que le traitement au xylophène soit correctement fait, poutre par poutre. L'apprenti-menuisier qui s'y applique fait des grands va et vients avec un pinceau presque sec, on a l'impression que c'est lui qui achète le produit, je le fais donc remplacer par Icham qui le fait toujours bien, sans lésiner sur la quantité. Puis les menuisiers posent les solives.
Pendant ce temps, les maçons ont commencé la troisième façade, celle côté sud. C'est la plus endommagée car de larges fissures, pour ne pas dire fentes, lézardent sa face et les poutres en bois qui servent de lintaux au dessus des trois ouvertures sont pourries et incurvées, le pan de mur qu'elles soutiennent à grand peine est aussi de très mauvaise qualité, fait de pierres et de terre sans aucun mortier. Toute cette partie est donc démolie et devra être remaçonnée en briques pleines. Une seule journée suffit à quatre ouvriers pour abattre cette façade tellement elle est fragile. Les trois lintaux ont été déposés et se sont révélés en piteux état, pourris jusqu'au coeur et vermoulus et on se demande comment ce pan de mur tenait encore debout. Nous allons les remplacer par des IPN neufs, deux côte à côte par ouverture. Ceux là tiendront au moins cent ans...
20.11.2009. Aujourd'hui a été une journée difficile. C'est pourtant vendredi, jour de repos, mais l'équipe des menuisiers est venue poser les grandes solives de la terrasse, sur une chambre du moins. Déjà ils ne devaient pas être de bonne humeur de travailler aujourd'hui mais telle a été la décision de Rachid afin de faciliter le bon déroulement des travaux et que les maçons ne soient pas gênés. Dès le début, je m'aperçois qu'ils sont là pour réaliser une tâche et donc plus vite ils auront fini et plus vite ils pourront sortir. Je commence à m'opposer à eux au sujet du traitement au xylophène, visiblement pas une priorité pour eux et le cadet de leurs soucis. Les solives sont enduites à la va-vite et les extrémités jamais faites (si j'étais un ver, c'est bien par là que j'entrerais...). Et puis ils commencent à placer le voligeage également sans traitement. "Après" disent-ils en choeur. "Okay" dis-je "mais les parties qui recouvrent les poutres, elles resteront donc non traitées...". "Machen mouchkil- pas de problème". J'exige donc que les voliges soient enduites une à une avant la pose. Ils commencent à faire une mine sombre, en plus que le soleil aujourd'hui darde ses rayons ardents et qu'il fait vraiment chaud sur la terrasse. En outre, ils placent systématiquement la première volige de travers si bien que toutes les autres ne sont pas alignées, je dois ainsi faire démonter plusieurs fois. Bref, le travail n'est pas bien fait et il faut que je reste constamment derrière eux. C'est du travail de qualité suffisante pour une étable mais pas pour une maison d'hôtes !
Rachid passe dans la journée et je lui fais part de mon mécontentement. Vers 14 heures, une des chambres est terminée et ils plient bagages.
Ils ont dû me détester aujourd'hui mais tant pis, le riad passe avant l'humeur de quelques lascars.
21.11.2009. Aie, ce matin, je me suis aperçu que le produit de traitement utilisé est destiné aux bois extérieurs. je n'avais pas pris garde car en plus, tout était écrit en italien sur le bidon. Je ne voudrais pas que plus tard, les clients de l'hôtel se plaignent de maux de tête ou de nausées. Donc je demande aux ouvriers de ne plus traiter les solives avec ce produit en leur expliquant bien la raison sinon ils me prendront pour un fou...J'en fais part à Rachid, lui demandant de commander un lot de bidons de produit pour l'intérieur et nous traiterons ultérieurement les bois en place. C'est moins efficace mais je n'ai pas le choix et ne veux pas prendre de risque.
Les menuisiers donc continuent aujourd'hui la pose des solives.
A la pause de midi, c'est la distribution des primes de l'Aid qui est exactement dans une semaine, le temps nécessaire pour trouver et acheter son mouton. Une enveloppe contenant ma part, celle de Rachid et celle de Sabah, l'ancienne propriétaire, est distribuée à chacun. Pourquoi Sabah, qui n'est encore jamais venue au chantier et qui ne connait donc aucun des ouvriers, donne-t-elle une prime ? C'est en tant que bonne musulmane et en respect du deuxième pilier de l'islam concernant l'aumône aux pauvres. Le Coran est clair à ce sujet: tout croyant est assujetti à donner 2,5% de ses avoirs non bloqués (dans l'immobilier ou dans la terre par exemple). Sont concernés donc les comptes en banque, les actions et même les sommes prêtées. Si l'on est riche, cela peut faire une coquette somme et bien peu sont les fidèles qui s'y plient. C'est certainement le précepte le plus noble de l'islam mais aussi le plus difficile à respecter. Sabah s'acquitte de sa dette chaque année. Il est sûr qu'un peu avant l'Aid, son téléphone sonne souvent, surtout de ceux dont elle a été la bienfaitrice.. Mais cette année, elle a pensé aussi aux ouvriers du riad, ce qui est une bonne idée.
Chacun prend donc son enveloppe, la plupart du temps sans remercier comme c'est souvent le cas au Maroc. On ne s'épanche pas en remerciements ici, tout juste un discret "chokran" ou "baraka" voire rien du tout. Mais bon, ce n'est pas grave, l'essentiel est qu'ils soient contents. Cela les aidera à acheter leur mouton pour l'Aid.
22.11.2009. A 11 heures, j'ai rendez-vous au riad avec l'ingénieur Bennani et avec l'électricien. C'est la première fois que Bennani met les pieds au riad après presque six mois de travaux alors qu'il est sensé faire le suivi du chantier...Je le lui dis et il me répond qu'il ne vient que sur demande et comme nous n'avons pas encore fait appel à lui, il n'est pas venu. Je lui fais remarquer que l'architecte est, lui, venu quatre fois et sans qu'on l'appelle. Evidemment, il voit des défauts qui auraient pu être évités s'il était passé à temps. Entre autre quelques mauvais alignements, ce qui n'est pas une catastrophe, mais plus grave, un IPN sensé soutenir une lourde charge et lui même reposant...sur une poutre en bois qui de plus n'a pas été changée. Il faudra donc ajouter à cet endroit un renfort métallique, ce qui heureusement peut être encore fait.
En cours de journée, nous recevons la visite de Sabah et de Ghita sa soeur qui ne sont jamais venues au riad depuis l'ouverture du chantier. Evidemment, c'est un choc pour elles et elles ne peuvent empêcher les larmes d'émotion les submerger.. Elles ont passé toute leur vie dans ce riad, leur père, grand père et arrière grand père y sont nés et décédés, la vision donc de leur maison complètement bouleversée et des lieux immuables de jadis chamboulés ne doit pas être facile à vivre. J'essaie de les consoler en disant que le riad sera plus tard un palais, une magnifique maison d'hôtes très prisée par les touristes, je leur montre aussi les nouveaux plafonds de cèdre mais mes paroles sont dérisoires par rapport à leur chagrin. Elles ne restent qu'un petit quart d'heure puis s'en vont, très émues. J'avoue qu'elles m'ont aussi très touché. C'est le problème de ces familles d'autrefois, très fortunées à l'époque qui, le temps passant, ont vu leur situation changer ou du moins devenir plus ordinaire, chacun devenant salarié d'une entreprise ou fonctionnaire. Les frais d'entretien de leur demeure familiale sont devenus de nos jours trop élevés et les ont contraints à la vente. C'est ce qui s'est passé pour Sabah. Elles étaient seulement quatre soeurs, deux se sont mariées et sont parties vivre ailleurs, elles ne sont restées plus que deux dans ce grand riad qui a dû héberger à ses heures de gloire au moins une trentaine de personnes. Il en est de même en France où des châteaux dans certaines régions sont à vendre au prix d'une simple maison. Mais quand il faut seulement refaire la toîture, cela vous coûte justement le prix de la dite maison...
23.11.2009. Les préparatifs de la fête de l'Aid battent son plein et l'on commence à voir dans la médina des gens tirant des moutons arqueboutés sur leurs quatre sabots et résistant comme ils le peuvent. Eux qui hier étaient encore en train de paitre paisiblement dans leur pré à la campagne se voient conduits de force dans ces rues bruyantes et grouillantes de monde. Mais beaucoup pour éviter de devoir trainer le mouton optent pour un transport sur une charrette. Hier, j'ai assisté à une scène cocasse: j'ai vu un veau d'une belle taille dévaler le Talâa Sghira avec son nouveau propriétaire emporté par la corde sensée retenir l'animal et quelqu'un essayant en vain de le retenir par la queue !
Partout on voit des ânes transportant de gros ballots de paille car la plupart des gens vont acheter leur animal quelques jours, voire une semaine, avant le sacrifice de l'Aid, les prix grimpant à mesure que la fête approche. Sur les marchés, on vend aussi de grandes quantités de charbon de bois pour les futures grillades.
Je me réjouis vraiment de passer l'AId El Kebir ici au Maroc car c'est la plus grande fête musulmane. Ce sera aussi mon premier Aid. On me demande souvent si moi aussi je vais sacrifier mon mouton alors je réponds que je ne serais même pas capable d'égorger un poulet alors un mouton...
27.11.2009. J-1 pour les moutons et les veaux dont on entend partout les bêlements et meuglements effarouchés venant des terrasses ou montant des cours. Dans le souk, on voit aussi des aiguiseurs affutant les instruments du sacrifice sur des meules à eau entrainées par le pied. On livre les derniers moutons sur les charrettes, le vendeur d'épices fait ses meilleures affaires et le quincailler a mis sur son étal couteaux, couperets, hâches et brochettes. Tous est prêt pour la fête.
28.11.2009. C'est aujourd'hui l'Aid El Kebir, le Grand Aid, la fête la plus importante des musulmans.
Dès cinq heures du matin, des chants montant du bas de la médina, probablement du quartier de la Qarawyine, se font entendre :"Allah akbar, Allah akbar (Dieu est grand)". Vers huit heure, je monte sur la terrasse. Les chants n'ont pas cessé, les bêlements des moutons non plus d'ailleurs. Après la prière, on peut théoriquement procéder au sacrifice mais beaucoup attendent que le roi égorge son mouton, évènement retransmis chaque année à la télévision.
Peu avant dix heures, je me rends chez Sabah où je suis invité pour la fête. Elle a commandité un boucher pour immoler son mouton et celui ci arrive vers midi. Il va chercher la bête qui a passé la nuit dans le garage de l'immeuble avec bon nombre de ses congénères. Elle est de belle taille, avec des cornes enroulées et l'oeil doux mais la peur se lit dans son regard quand le boucher et son adjoint la poussent à l'intérieur de l'appartement direction la cuisine. La scène ne dure que quelques instants, l'animal est culbuté sur le dos, on dissémine autour de lui un peu de sel, une courte prière est dite puis le couteau fait son oeuvre, d'un seul coup d'un seul, sous les youyous des deux femmes.
C'est pénible à voir pour un occidental mais c'est un acte séculaire qu'il faut respecter. Je me retire alors discrètement et n'assiste pas au dépeçage ni au vidage de la bête.
Plus tard, je retourne dans la cuisine: l'animal est pendu à un croc et ressemble à tous les quartiers de viande qui ornent les étals des bouchers du Talâa Kebira, il a perdu son statut d'être vivant et animé, ce n'est plus que de la chair d'autant plus que toute trace de sang a été nettoyée.
Au repas, nous mangeons les abats en brochettes, c'est à dire le foie et le coeur, préparées au feu de bois d'un braséro. Délicieux. La viande, qui doit reposer, ne sera consommée que dans quelques jours et demain, ce sera le tour des poumons, du pancréas et de quelques parties des intestins, le tout préparé en tagines.
Vers vingt heures, je rentre au riad. Les rues sont très animées, chacun a mis ses plus beaux atours, les hommes souvent en djelabas blanches et brodèes et babouches jaunes et les dames en kaftans somptueux.
Le calme est retombé sur le quartier autour du riad, les bêlements ont cessé et je crois pouvoir dire qu'il n'y a plus un seul monton survivant ce soir dans la médina de Fès.
Mon premier Aid El Kebir au Maroc.
20.12.2009. Le temps a passé, les vacances de l'Aid sont derrière nous et le chantier a repris son activité habituelle. La façade sud est à présent pratiquement terminée, les ouvriers finissent aujourd'hui de placer les rangées de tuiles vertes. Ces tuiles ont un effet esthétique certain mais elles protègent efficacement les façades intérieures du riad car elles sont posées sur un décrochement qui permet à l'eau de pluie de tomber sans couler sur les murs.
Avec l'électricien nous avons défini tous les emplacements des point lumineux, des prise et des interrupteurs ainsi que des tableaux et des compteurs. Il m'a proposé un compteur général de 60 ampères, donc avec une puissance importante mais l'ingénieur m'a conseillé la pose de deux compteurs de 30 ampères car le prix des kilowatts/heure sera plus bas. Bon conseil pour moi mais pas pour l'électricien qui aura plus de travail...
Le solivage de la partie nord de la terrasse est enfin terminé, les dernières poutres ont été posées hier et les maçons ont coulé une chape de forme.
L'équipe des électriciens a commencé son travail sur la terrasse, c'est à dire la pose des tubes électriques. Hélas, je me suis absenté cinq minutes et ils ont eu l'idée de poser une prise...sur le bordj, un ouvrage datant du 14ième siècle et que je tiens à tout prix à préserver. Tant pis, le mal est fait, la saillie a été creusée dans ce mur vénérable, c'est trop tard pour revenir en arrière. Ils ne comprennent bien sûr pas mes reproches, que c'est un mür qui date des Mérinides et qu'il faut conserver, pour eux leur choix s'est porté sur lui car il semblait plus fragile donc plus facile à creuser que les autres.
Le plombier est également passé aujourd'hui. Nous avons discuté de l'écoulement des eaux pluviales de la terrasse. Ceci est primordial et doit être fait au plus vite car si la terrasse est rendue étanche, encore faut-il poser les descentes et les regards d'évacuation de l'eau.
Nous avons décidé avec Rachid, chose qui n'est pas au cahier de charges mais qui me semble essentielle, de procéder à l'étanchéification de la terrasse par deux couches croisées de carton bitumeux collées au goudron. On a eu beau me dire que les terrasses traditionnelles en markouz se suffisent à elles mêmes, je préfère prendre mes précautions et ajouter cette protection supplémentaire. Il n'y a rien de pire dans une maison qu'une fuite d'eau.
Je passe avec Rachid dans les rue des fournisseurs et nous commandons le matériel sanitaire. Il est livré en fin d'après midi mais avec hélas quelques pièces manquantes qu'il nous faudra retourner chercher.
13.12.2009. J'ai vraiment l'impression que nous avançons bien aujourd'hui, le chantier bourdonne comme une rûche. Il y a l'électricien et ses deux ouvriers qui continuent la pose des tubes électriques. Hier, ils ont terminé une partie de la terrasse et aujourd'hui, ils continuent à l'étage. Les beaux murs de tuiles pleines sont hélas entaillés de longues saignées mais nous n'avons pas le choix pour faire passer les câbles.
Le plombier a aussi commencé à placer les descentes d'eaux pluviales de la terrasse. Ceci est très important car il faut à tout prix éviter en cas de pluie l'accumulation d'eau sur la terrasse qui auraient pour conséquence des infiltrations vers les beaux plafonds de cèdre tout neufs de l'étage inférieur.
Avec les maçons et les ouvriers qui sont là tous les jours et les menuisiers nous sommes bien une vingtaine de personnes au riad, chacun occupé à son ouvrage. Moi, je vais d'un côté et de l'autre du chantier, décidant de l'emplacement d'un regard d'écoulement, d'un tableau électrique ou d'un conduit de cheminée, définissant la disposition des appareils sanitaires d'une salle de bains ou la position d'un placard, bref je suis sollicité de tous les côtés. Comme la présence quasi permanente du maître d'ouvrage est importante sur un chantier me disent souvent les ouvriers car à chaque question qu'ils se posent, ils recoivent une réponse ou une décision immédiate. On évite ainsi les malentendus ou les mauvaises options. Hélas, je vais m'absenter pratiquement un mois pendant les fêtes de fin d'année que je veux bien sûr passer en famille en France..
Avec l'entrepreneur, je définis les travaux à faire pendant mon absence, privilégiant ceux qui vont prendre du temps et qui ne nécessitent pas forcément mon intervention comme la reconstruction d'un mur complet de la façade qui menace de tomber, ou bien la démolition de la mesriya qui va prendre aussi un bon bout de temps. Toutes les parties "sensibles" et surtout nouvelles sont laissées jusqu'à mon retour en janvier.
14.12.2009. Il fallait s'y attendre, le beau temps qui persistait depuis cet été à part quelques courtes averses s'est dégradé cette nuit, il a plu des cordes pendant plusieurs heures et les gouttes qui tombaient sur la bâche plastique recouvrant la "piscine" faisaient un tel vacarme que j'ai été réveillé. Vers minuit, je suis monté sur la terrasse pour constater que celle ci comporte de larges parties creuses où l'eau s'accumule et pire, que les regards d'écoulement placés hier par le plombier l'ont été trop haut si bien qu'ils sont parfaitement inopérants. L'eau a commencé à s'infiltrer à travers les plafonds en bois tout neufs de l'étage et même a par endroit traversé le plancher de l'étage c'est à dire le plafond du rez de chaussée et, le comble, il se met à goutter dans ma chambre exactement au dessus de mon lit ! Je pousse celui ci dans l'autre bout de la pièce pour ne pas mouiller mon sac de couchage: Dans le grand couloir de l'étage, au dessus de ma chambre, le spectacle de l'eau tombant de la terrasse est impressionant. Là aussi, le regard placé hier par le plombier ne sert à rien, mais ici, c'est normal car la dalle a été construite parfaitement horizontale et la pente ne sera réalisée qu'en finition, avec la chape et les carreaux de zelliges. Par contre sur la terrasse, la chape a déjà été faite et la volonté de réaliser une pente était bien à l'esprit des mâalems, mais pas les moyens. Je les regardais avec circonspection tirer la chape à l'aide d'un bout de bois de 1,50m, sans aucun guide et à peine en utilisant un niveau à bulle, vraiment tout au jugé. Normalement, on devrait travailler sur des guides ajustés pour donner la pente et tirer la chape avec un vraie règle de maçon, mais je n'ai jamais vu un tel outil ici au chantier. Il est certain qu'à l'aide d'un bout de bois plus ou moins droit mais qui plus est, sans s'aider de guides, on risque de creuser la chape et de créer par temps de pluie des flaques d'eau. C'est exactement ce qui se passe à la terrasse, une très large partie au centre est creuse et l'eau s'y accumule sur trois ou quatre centimètres. Bon, il est vrai, l'étanchéité par le bitume n'a pas encore été faite et on peut encore rattraper le défaut, mais si les mâalems travaillent de la même façon pour la dernière chape de dressage, le mal sera consommé et il ne restera que les zelliges pour corriger le tout, ce à quoi je doute fort.
Demain, matin, il faudra alerter Rachid et lui faire promettre de travailler différemment car je n'accepterai pas une terrasse même étanche mais laissant l'eau s'y accumuler. Une terrasse bien faite doit, après l'arrêt de la pluie, permettre l'évacuation totale et rapide de l'eau puis sécher complètement en une demi-heure environ.
15.12.2009. Les ouvriers ont commencé la chape de dressage de la terrasse. Contrairement à mes craintes, ils procèdent de façon tout à fait correcte en confectionnant des guides en ciment qui convergent vers les descentes d'eau avec une pente adéquate. Puis ils emplissent les parties entre ces guides en tirant le ciment avec des règles en bois. Mes doutes en les observant faire la chape de forme étaient donc infondés.
18.12.2009. Je rentre en France aujourd'hui afin de passer les fêtes de fin d'année en famille. Dans le train qui me ramène vers Marrakech, j'observe que la pluie commence à tomber. Espérons que ce ne sera que passager car l'étanchéité sur la terrasse n'a pas encore été faite. Même si on la recouvre d'une bâche, l'eau va s'écouler sur les côtés. Cette histoire du bois nous a fait perdre environ un mois, normalement nous aurions dû terminer les travaux de la terrasse avant l'Aid.


La 1ére façade intérieure est terminée


Travail d'équipe


La 1ére façade


Travaux à la 2ième aile


2ième aile face au borj


Tous les matériaux sont transportés dans des sacs


Icham réceptionne un sac de briques


Chambre au dessus des salles de bains


Ahmed maçonne des planches de rive


Said inspecte un ancien IPN


Said et Ahmed dans la piscine préparent la chaux


Travaux à la 2ième façade


2ième façade


2ième façade: démontage d'une fenêtre


2ième façade: confection d'une nouvelle fenêtre


3ième aile: inspection d'un ancien plafond


Les anciennes solives sont pourries en bout


Démontage d'un ancien plafond


La 3ième façade est en mauvais état


Démolition de la 3ième façade


Pose d'IPN sur la 3ième façade


Les menuisiers en action: réfection d'un plafond


Le nouveau plafond est traité


Aid El Fitr: fête du mouton


Aid El Fitr: sacrifice du mouton


Dalle traditionnelle en markouz


Préparation de la chape sur la terrasse


Guides en ciment pour la chape


Pose des gaines électriques


Le mal est fait: pose de gaines sur le borj


Pose de tuiles


La chape de la terrasse de la 2ième aile est terminée


Après une averse, vue sur le patio


La 3ième façade est terminée


Vue du riad sur la médina de Fès

Le Riad Sabah est une maison d'hôtes (hotes) à Fès au Maroc comprenant huit suites et trois chambres. Au Maroc à Fez dans la médina, des hotels, des maisons d'hotes et ryads, location d'une suite, un logement de charme avec 9 chambres. A Fez (Maroc) non loin de Bab Boujloud, des maisons d'hôtes et riads de luxe avec vue sur la vieille ville et hébergement dans un hôtel, une résidence dans la médina, un logement de charme avec des chambres.
Riad Sabah, une maison d'hotes à Fès avec chambres et suites.

A Fès (ou Fez) au Maroc, riads et maisons d´hôtes.
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